Nos vies sont à l’arrêt total depuis environ 7 semaines. Cette situation inédite nous force à réviser notre manière de travailler, et il est parfois difficile de se recréer une routine lorsqu’on reste tout le temps chez soi.
Tous les jours, nous avons des lieux et des horaires rythmant notre vie : domicile, lieu de travail, activités sportives, sorties... Changer d’environnement permet de séparer mentalement les différentes phases quotidiennement. Par exemple, le stress du travail nous quitte à la fin de la journée lorsque nous rentrons chez nous. Confinés, nos repères spatio-temporels sont brouillés et la distinction mentale et émotionnelle est plus difficile à faire. Et nous ne sommes pas tous égaux face au confinement, la taille de l’habitation et les personnes que nous côtoyons pèsent dans la balance.
C’est un phénomène qui existait déjà avec les nouvelles technologies. En installant des moyens de communication sur notre téléphone, notre esprit est sans arrêt sollicité par notre conscience professionnelle, le travail qui nous attend ou les imprévus. On perd alors la notion du temps, effectuant des horaires plus lourds que ce qui est initialement prévu. Beaucoup d’entre nous vivent cela, fortement amplifié par le confinement, provoquant alors du stress, de l’anxiété, voire des burn-out. Être organisé devient très compliqué, on est submergé par les tâches qui s’accumulent et le stress nous rend moins efficace, donc on se retrouve piégé dans une spirale infernale. Il faut parfois se déconnecter et souffler pour pouvoir reprendre le travail plus sereinement.
A l’inverse, certaines personnes voient cette période comme une occasion d’apprendre, de faire de nouvelles choses et d’organiser leur temps comme elles le souhaitent. La pandémie a provoqué une énorme vague de chômage partiel, et du jour au lendemain ces personnes se sont retrouvées sans activité. Ne rien faire, avoir du temps libre est indéniablement attrayant, mais dans ces conditions, cela peut vite tourner au supplice. Elles sont d’autant plus touchées par les restrictions de déplacement, et trouver des activités en tous genres est le meilleur moyen d’éviter la frustration. Activités manuelles, musique, cuisine, formations professionnelles en ligne : notre esprit a besoin d’être stimulé tout au long de la journée pour conserver un rythme sain et préserver notre sommeil.
La perte de lien social est également un facteur influençant notre rapport au travail en confinement.
Le travail représente une grande partie de nos interactions sociales. C’est d’autant plus le cas pour les gens vivant seuls. Il est donc très difficile de se retrouver entre ses quatre murs du jour au lendemain, à devoir effectuer le même travail, sans les pauses entre collègues permettant de souffler. Nous avons besoin de reconstituer nos rituels, comme les discussions autour de la machine à café le matin. Voir nos collaborateurs en vidéoconférence a également un effet très positif sur notre moral, nous avons besoin d’informalité pour recréer le climat professionnel auquel nous sommes accoutumés. C’est pour cette raison que les entreprises multiplient les moyens de communication (Slack, Zoom…). Les employeurs ont rapidement compris qu’afin de maintenir l’équilibre du moral de leurs salariés, ils allaient devoir être très présents, transparents et à l’écoute.
Encore une fois, les frontières entre le professionnel et le personnel sont rapidement vagues. L’expérience des parents confinés avec de jeunes enfants en est l’illustration parfaite : il faut jongler entre l’école à la maison, le travail, les tâches ménagères pendant la journée. Par exemple, est-ce moralement acceptable que je fasse l’école à mes enfants, tout en sachant que mon travail m’attend également ? Certains délaissent un peu la vie professionnelle au profit de leur vie de famille, ou inversement. Le confinement nous force réellement à revoir les rapports que nous avons avec les autres.
Mais l’après-confinement peut également être source de stress. Certaines personnes ont apprécié cette période de télétravail, ayant plus d’autonomie et de flexibilité. Le retour à la normale et les interactions sociales multiples peuvent donc les brusquer. Elles auront besoin de conserver cette autonomie, de se retrouver avec elles-mêmes.
Cela ouvre d’ailleurs de nombreuses questions sur notre relation au travail dans le futur. Les managers ont noté que le télétravail a tendance à responsabiliser leurs employés, ces derniers apprécient également d’avoir plus d’autonomie et de pouvoir gérer leur planning. Intégrer le télétravail à hauteur d’un ou deux jours sur la semaine, selon les envies de chacun, pourrait être un modèle plus équilibré.
Face à ce que les médias véhiculent, nous pouvons avoir l’impression de ne pas être assez productifs. Mais certaines phases de notre vie exigent que nous ayons un passage à vide, plus calme et reposant, tandis que d’autres sont plus fertiles et productifs. L’essentiel est simplement d’aller à son rythme !